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VENTE : la réalisation forcée d’une promesse de vente, en cas de refus de réitérer, sauf stipulation contraire, et pas obligatoirement l’allocation de dommages intérêts !

Droit de l’immobilier et de la construction

Selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 5 janvier 2021), par acte authentique du 21 octobre 1971, [S] [D] a promis de vendre à [M] [K], ou à ses ayants droit, la parcelle de terrain cadastrée section A n° [Cadastre 2], devenue la parcelle A n° [Cadastre 3], que cette dernière exploitait à [Localité 4] selon bail du 23 septembre 1961.


Cette promesse unilatérale de vente était consentie pour quatre années à compter du 1er novembre 1971, durée tacitement prorogée et prenant fin un an après la mise en service d’une rocade à proximité de la parcelle et dont le principe de la construction était acquis.


[S] [D] et [M] [K] sont décédées, respectivement les 28 décembre 1978 et 6 mars 1999, laissant pour leur succéder, la première, son fils, M. [L] [D] (le promettant), la seconde, son fils, M. [U] [K] (le bénéficiaire).

Par lettre recommandée du 1er juin 2011, le promettant a indiqué au bénéficiaire qu’il considérait la promesse de vente comme caduque.


Le 18 novembre 2016, le bénéficiaire a levé l’option, dans le délai prévu par la promesse, la rocade devant être ouverte à la circulation le 24 novembre suivant.



Sans réponse du promettant, le bénéficiaire l’a assigné, le 17 janvier 2018, aux fins de transfert de propriété de la parcelle cadastrée section A n° [Cadastre 3] et de condamnation au paiement de dommages-intérêts pour résistance abusive.

Le bénéficiaire fait grief à l’arrêt de rejeter sa demande de transfert de propriété de la parcelle cadastrée section A n° [Cadastre 3] ainsi que sa demande en dommages-intérêts pour résistance abusive, alors « que le promettant signataire d’une promesse unilatérale de vente s’oblige définitivement à vendre dès la conclusion de l’avant-contrat, sans possibilité de rétractation, sauf stipulation contraire ; qu’en considérant qu’il ne lui était pas possible d’ordonner la réalisation forcée de la vente dans la mesure où le refus du promettant de se soumettre à son obligation de faire ne pouvait se résoudre qu’en dommages et intérêts, la cour d’appel a violé les articles 1101, 1134 et 1142 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ensemble l’article 1583 du même code. »

Au visa des articles 1101, 1134, alinéa 1er, et 1142 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, la Cour de cassation rappelle qu’aux termes du dernier, toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages et intérêts, en cas d’inexécution de la part du débiteur.


Alors qu’il était jugé antérieurement, en matière de promesse unilatérale de vente, que la levée de l’option, postérieurement à la rétractation du promettant, excluait toute rencontre des volontés réciproques de vendre et d’acquérir, de sorte que la réalisation forcée de la vente ne pouvait être ordonnée, la violation, par le promettant, de son obligation de faire ne pouvant ouvrir droit qu’à des dommages-intérêts, la Cour de cassation, procédant à un revirement de jurisprudence, juge, depuis une décision du 23 juin 2021 (3e Civ., pourvoi n° 20-17.554, publiée) que la promesse unilatérale de vente étant un avant-contrat qui contient, outre le consentement du vendeur, les éléments essentiels du contrat définitif qui serviront à l’exercice de la faculté d’option du bénéficiaire et à la date duquel s’apprécient les conditions de validité de la vente, le promettant s’oblige définitivement à vendre dès la conclusion de l’avant-contrat, sans possibilité de rétractation, sauf stipulation contraire.

Bien qu’énonçant que la révocation de la promesse par le promettant pendant le temps laissé au bénéficiaire pour opter ne peut empêcher la formation du contrat promis, l’arrêt retient qu’il n’est pas possible en pareil cas d’ordonner la réalisation forcée de la vente, s’agissant d’une obligation de faire ne se résolvant qu’en dommages-intérêts.


En statuant ainsi, se conformant à l’état de la jurisprudence à la date du prononcé de son arrêt, la cour d’appel a violé les textes susvisés.

Cass. Civ. 3e, 21 nov. 2024 ; Pourvoi n° W 21-12.661