Dans un immeuble soumis au statut de la copropriété, Mmes [Z] et [P], respectivement nue-propriétaire et usufruitière d’un appartement, assignent le syndicat des copropriétaires du Domaine d’Occi en annulation de la résolution n° 20, de l’assemblée générale des copropriétaires du 5 mai 2017, confiant la mission au syndic de les mettre en demeure de remplir leurs obligations de copropriétaire pour ne pas continuer à nuire aux droits d’un autre copropriétaire, Mme [S], et à l’harmonie des bâtiments, en refusant la pose d’un brise-vue prévue par la promotion.
Mmes [Z] et [P] font grief à l’arrêt de rejeter leur demande, alors :
« 1°/ que constitue un abus de majorité le fait pour une assemblée de copropriétaires de voter une délibération dans l’intérêt exclusif d’un seul copropriétaire ; qu’en estimant que l’abus de majorité ne pouvait être constitué qu’au profit de la majorité des copropriétaires, et non à celui de la seule Mme [S], la cour d’appel a violé les articles 1240 du code civil et 10 de la loi du 10 juillet 1965 ;
2°/ que les parties communes à usage privatif confèrent aux copropriétaires un droit réel d’usage, qui ne peut pas être modifié par le syndicat des copropriétaires ; qu’en estimant légale la délibération autorisant le syndic à mettre en demeure Mmes [Z] et [P] d’installer un brise-vue sur leur terrasse, qualifiée de partie commune à usage privatif, la cour d’appel, qui a autorisé le syndicat à intervenir dans les modalités de jouissance de cette terrasse, a violé l’article 6-3 de la loi du 10 juillet 1965. »
Sur l’abus de majorité
La cour de cassation approuve la cour d’appel d’avoir énoncé, à bon droit, qu’une décision d’assemblée générale ne peut être annulée pour abus de majorité que s’il est établi qu’elle est contraire aux intérêts collectifs des copropriétaires ou qu’elle a été prise dans le seul but de favoriser les intérêts personnels des copropriétaires majoritaires au détriment des copropriétaires minoritaires.
Considérant la décision n’avait pu être prise dans le but de favoriser les intérêts personnels des copropriétaires majoritaires, à défaut pour Mme [S] de pouvoir être qualifiée de copropriétaire majoritaire, la cour de cassation devait vérifier si l’abus de majorité invoqué correspondait à la première hypothèse, qui suppose que la résolution litigieuse était contraire aux intérêts collectifs des copropriétaires.
Compte tenu de son objet, l’appréciation de cet intérêt ne pouvait s’apprécier qu’au regard du respect de l’harmonie de l’immeuble. Or la cour de cassation approuve la cour d’appel, après avoir souverainement retenu que Mmes [Z] et [P] n’établissaient pas que l’occultation des joues des balcons par la pose de châssis modifierait l’harmonie de l’immeuble, elle en exactement déduit que la demande d’annulation de la résolution n° 20 pour abus de majorité devait être rejetée.
Sur « l’usage » des parties communes à usage privatif
La cour de cassation rejette le moyen en considérant que la cour d’appel a relevé que Mmes [Z] et [P] ne démontraient pas que la pose d’un brise-vue sur leur terrasse modifierait les conditions de son utilisation.
Cass. Civ. 3, 22 juin 2022, 21-17.071, Inédit